SOLIDARITÉ  MAGAZINE

 

 

Bulletin semestriel

de la Commission de la Solidarité Internationale

de l’Association Voir Ensemble

 

 

 

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« Avec nos différences, tissons ensemble une terre solidaire »

CCFD-Terre solidaire.

 

 

 

 

 

   N° 49                                                           1er semestre 2018

 

 

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SOLIDARITÉ  MAGAZINE

 

 

 

 

Numéro 49                                                                       Premier semestre 2018

 

 

 

 

 

Siège : Voir Ensemble, Solidarité Internationale, 15 rue Mayet, 75006, Paris

CCP : Voir Ensemble, Solidarité Internationale : 5755065 L 020

Téléphone (Président de la Commission) : 06 60 63 96 60

Adresse électronique : csi@voirensemble.asso.fr

 

 

 

Équipe de Rédaction : Yves Dunand, Cécile Guimbert, Marie-Claude
                        Cressant, Alain Bardet, André Maitrias

 

 

 

 

 

 

 

Ce bulletin est distribué gratuitement mais, en raison des frais élevés qu'il engendre, les dons à la Commission de la Solidarité Internationale sont les bienvenus.

Ces dons peuvent être adressés directement au Siège de l’association, Voir Ensemble, Commission de la Solidarité Internationale, 15 rue Mayet, 75006 Paris. Les chèques doivent être libellés à l'ordre de "Voir Ensemble, Solidarité Internationale".

Nous enverrons en retour un reçu fiscal car tout don effectué à une association reconnue d'utilité publique donne droit à une déduction fiscale de 66% de son montant.

Avec nos plus chaleureux remerciements anticipés !

 


 

 

 

Au sommaire

 

 

La solidarité, école de fraternité  4

Accueil des partenaires de Carême  au CCFD-Terre Solidaire, mars 2018  6

« Il n’est de lumière que plurielle »  8

Ma tendresse d’aujourd’hui  (poème) 9

Mission de sensibilisation à la locomotion au Burkina Faso  10

À la découverte de l'Union Nationale des Associations Burkinabé pour la Promotion des Aveugles et Malvoyants  12

Rapport sur la culture d'un champ de maïs  au Congo Brazzaville  14

École guinéenne : un chemin semé d’embûches  pour les déficients visuels  17

Chanson de l'étoile bleue  (poème) 22

Sénégal : Emploi : petite lueur chez les déficients visuels, ils en veulent plus ! 22

Rencontre avec Me Janvier Alfred Ngalle Mbock,  premier avocat non-voyant au Cameroun   24

Courrier du Sud.. 25

Rubrique humour. 28

Recette : Dal indien aux brocolis et aux épices. 29


 

 

 

La solidarité, école de fraternité
par André Maitrias (membre du Comité de la CSI)

 

 

Lorsqu’Yves DUNAND, responsable de la CSI, m’a demandé de faire l’édito de ce numéro de Solidarité Magazine, j’ai eu l’appréhension du nouveau militant, du ton à trouver, mais la première question était le choix du thème qui serait fil conducteur et nous ferait entrer dans les pages de ce numéro.

L’actualité nous interpelle chaque jour, par sa violence, son cynisme et son injustice, dirigée envers les plus faibles. Un des sujets de philo 2018 questionnait les candidats sur la nécessité d’avoir éprouvé l’injustice pour savoir ce qui est juste.

Je ne pense pas avoir subi une ou des injustices qui m’en auraient donné le sens, mais je crois avoir reçu une éducation empreinte de valeurs morales qui m’en donne l’essence intellectuelle et m’a gravé ce pouvoir d’indignation auquel nous invitait Stéphane HESSEL et son corollaire : la SOLIDARITÉ.

La violence est sous nos yeux, chaque jour, amplifiée par les médias. Dépassant leur devoir d’alerte ils en font leurs scoops, ouvrent des débats, brassés sans fin, au point de perdre le fond pour n’en retenir que l’écume.

ü  Ici un bateau qu’on refuse, alors qu’étaient demandés secours et humanité.

ü  Ailleurs des enfants que l’on encage, séparés de leurs parents, véritables otages d’une politique conduite avec cynisme. Libérés le lendemain d’une signature ostentatoire pour créer l’illusion d’une grande humanité.

ü  En Côte d’Ivoire, BOUAKÉ, 2ème ville du pays, un million cinq cent mille personnes, un long alignement de seaux, bidons et bassines, sur des centaines de mètres, créé par femmes et enfants, présents chaque jour dans l’espoir de quelques litres d’eau. Trois ans de sécheresse, liée pour partie aux changements climatiques auxquels semblent indifférents ceux qui abandonnent une à une les résolutions des accords de Paris et de la COP 22.

ü  Huit personnes sur la planète détiennent autant de richesse que la moitié la plus pauvre de la population mondiale. Situation "indécente" relevée par l'ONG britannique Oxfam.

Voilà des exemples de l’actualité en cette fin juin 2018, qui nous poussent à appeler ardemment de nos vœux un monde meilleur.

Pour nous, à la CSI, il importe d'aller au-delà des constats et des discussions qu'ils engendrent pour nous engager, et tenter de répondre à cet appel à vivre une année de Solidarité, de Fraternité lancée lors de l’Assemblée Générale de Voir Ensemble par notre aumônier.

Nous engager, non pas à gommer et réparer tous les excès et dérives des hommes. Nous ne serons pas les anges salvateurs, mais puissions-nous agir ensemble, avec les Groupes qui composent notre Mouvement, avec d’autres associations et donner un peu de lumière et d’espoir à nos Frères et Sœurs d’Afrique francophone. Ceux-là même qui ne prendront pas les bateaux mais vivent plus encore la précarité, la souffrance et l’exclusion qu’induit leur handicap et dont ne sont souvent retenues que les incapacités supposées.

Portons notre regard au-delà de l’écran, de la coupure de presse, alors les choses ne sont plus simplement de nature factuelle, papier glacé ou images télévision. Elles dessinent ceux que nous aurions pu être, femmes, hommes, enfants, tous singuliers mais qui nous sont terriblement semblables.

Lors de notre Assemblée Générale de Voir Ensemble, notre Président Jacques CHARLIN citait une phrase du Père Teilhard de Chardin, déjà mise en exergue dans un précédent numéro de ce bulletin : « Le monde appartiendra à ceux qui lui auront donné une plus grande espérance ».

Ceci est à notre portée. Je ne suis ni bon, ni mauvais. Pas plus ou moins que vous, je peux être et l’un et l’autre mais souhaite m’engager avec le plus grand nombre dans ce défi de Solidarité, de Fraternité, de Justice, celle-ci dont Platon disait qu’elle était « la faculté d’attribuer à chacun ce dont il a besoin ».

Les pages qui suivent ont été choisies pour faire cet inventaire des défis, des réussites et des difficultés que nous pouvons atténuer, parfois avec peu de moyens et une grande détermination.

Le CCFD Terre-Solidaire, réunissant pour le Carême des délégations d’autres continents, nous fait faire ce tour du monde de l’universalité des difficultés et nous invite à son marché des réussites, ouverture vers les possibles.

Espoirs relayés par Monseigneur VESCO, évêque d’Oran, qui questionne notre posture face aux migrations et rapports interreligieux, pour nous inviter à embrasser l’idée d’une humanité plurielle, telle qu’elle se manifeste déjà dans l’Algérie d’aujourd’hui.

Véronique LAURÈS, toujours bien présente au cœur de ses amis de la CSI cinq ans après sa disparition, lui répond avec sa sensibilité par « ce regard qui brille à l’idée d’une vaste et unique famille ».

Et n’est-ce pas ce même regard plein de générosité qui a poussé Carine et Flora, jeunes instructrices en locomotion, à partager leur expérience et leurs compétences avec des professionnels de l’École des Jeunes Aveugles de Ouagadougou, au Burkina Faso ? Du reste, en lisant l’article présentant l’Union Nationale des Associations Burkinabè pour la Promotion des Aveugles et Malvoyants (UN-ABPAM), avec laquelle nous sommes en relation depuis plus de 25 ans, vous comprendrez aisément pourquoi nous avons estimé que ce pays constituerait un terrain idéal pour la pleine réussite de cette mission.

Mais les domaines dans lesquels nos frères et sœurs d’Afrique francophone parviennent peu à peu à sortir de la marginalisation sont multiples. En témoigne le retour d’un microprojet de production de maïs, au Congo, soutenu par la CSI, dans lequel ont pu s’investir des femmes et hommes aveugles et malvoyants, trouvant ainsi dignité, valorisation et revenus.

D’autres exemples ? Le fil des pages guide notre chemin de la Guinée au Cameroun, en passant par le Sénégal et le Bénin, avant de filer dans l’océan Indien auprès de l’Association VOATRA ASA à Madagascar. Partout vous trouverez, certes des difficultés que nous pouvons ensemble essayer de gommer, mais surtout le formidable espoir de réussite, de dépassement de situations d’exclusion, d’incapacités supposées. Que ces pages créent entre nous, femmes et hommes frères en Humanité, des mouvements proactifs pour faire sens, des envies de Participer, d’être Solidaires.

Je laisserai la réflexion s’ouvrir sur un mot de mon compatriote auvergnat, Abdennour BIDAR, né à Clermont-Ferrand, philosophe, essayiste et haut fonctionnaire français. 

« Dans la fraternité, il y a l’amitié entre les cultures, et la solidarité entre ceux qui ont beaucoup et ceux qui n’ont pas assez ».

 

A.M. 28.06.2018

 

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Accueil des partenaires de Carême
au CCFD-Terre Solidaire, mars 2018
par Marie-Claude Cressant, déléguée de Voir Ensemble au CCFD

 

Cette année encore, les 7 et 8 mars, j’ai participé au cérémonial d’accueil des responsables d’organisations partenaires du CCFD arrivant de quatre continents pour animer les rencontres de Carême dans les diocèses de France. Ce fut un moment de partages enrichissants, de convivialité et d’ouverture sur les grands enjeux de la planète.

Première surprise, il fallait choisir lors de la remise des badges un petit foulard parmi une dizaine de sortes différentes, me voilà partie avec un morceau de tissu vert couvert de motifs en coquilles de couleurs vives. Après le café d’accueil, nous voilà tous assis dans la grande salle de la rue Violet où se déroule habituellement cette manifestation.

Surgissent alors des jeunes en survêtements courant en tous sens, et s’affiche le départ d’un décathlon : le résumé sportif des épreuves qui attendent nos hôtes pour ce séjour en France. Sont mimés les rituels de bonjour avec les bises, les repas, avec le symbole des fromages, le froid, les transports, le décalage horaire, les réunions nombreuses, les Français râleurs, etc. Tout ceci, sur un mode comique et endiablé.

Suit un chaleureux mot de bienvenue de la présidente du CCFD, comparant nos hôtes étrangers à l’arrivée des hirondelles annonciatrices du printemps, un bref résumé de la signification du Carême pour l’Église de France, insistant sur le thème proposé cette année dans la brochure : « Avec nos différences tissons ensemble une Terre solidaire ». Puis l’appel de chaque partenaire qui nous dit son petit mot de présentation.

Hélas, il y a quelques absents, un Congolais qui n’a pas eu son visa, d’autres qui arriveront un peu plus tard. Un peu moins nombreux que les années précédentes (certains viennent à d’autres moments dans le cadre de programmes régionaux), ils arrivent du Brésil, Pérou, Guatemala, Mexique, Haïti, Algérie, Maroc, Égypte, Gaza, Roumanie, Guinée, Côte d’Ivoire, Mali, Birmanie, et j’en oublie quelques-uns.

Un déjeuner multiculturel

Nous sommes invités ensuite avant le déjeuner à nous réunir pour faire connaissance entre porteurs du même foulard, pour un moment d’échange en petits groupes. C’est ainsi que je me retrouve avec une salariée, une interprète, une bénévole de Normandie. Comme le hasard a mis parmi nous trois partenaires, nous avons à cœur de les écouter.

Luminata vient de Roumanie, elle travaille dans une association s’occupant des minorités pour les aider à accéder à leurs droits. Une boutique avec réapprentissage de l’artisanat traditionnel permet à des personnes défavorisées de reprendre place dans la société, une grande attention est donnée aux femmes très pauvres ignorantes des lois qui se font exploiter par des organisations mafieuses.

Désiré vit en Côte d’Ivoire, il travaille dans une association fondée à l’origine par des religieuses pour s’occuper de la santé. Actuellement, leurs préoccupations s’élargissent à l’occupation des terres. Vu l’absence de documents écrits en fait de titres de propriété, des multinationales essaient de s’emparer des terres traditionnellement cultivées par les villageois.

Ernestina est béninoise, elle milite pour les droits des femmes, persuadée que ce sont elles les plus aptes à faire évoluer les mentalités, pour lutter contre les mariages forcés, les croyances ancestrales, et donner aux filles une éducation citoyenne.

 

 

 

Le marché des réussites

Après le déjeuner nous sommes invités aux ateliers « marché des réussites », qui se regroupent cette année autour des thèmes : paix et vivre ensemble, migrations, justice climatique, souveraineté alimentaire. J’écoute d’abord Fatou, Sénégalaise porte-paroles des femmes qui assurent la transformation du poisson pêché aux alentours de Dakar. Des terres leur ont été confisquées pour l’édification d’une centrale à charbon, aujourd’hui en fin de construction, pour fournir de l’électricité destinée à être vendue en particulier à la Gambie. Cette centrale doit être approvisionnée par du charbon venant d’Afrique du Sud où l’extraction minière rend malades des populations et défigure les territoires. Les femmes sénégalaises se sont vu attribuer des terrains près de la mer où l’érosion fait des ravages, la mer envahit par moment leurs maisons, elles ne peuvent plus accéder à des espaces cultivables ni exercer leur transformation du poisson. Craignant une pollution accrue sur la zone de Dakar déjà très impactée par ce fléau, elles mènent une action de plaidoyer avec des femmes africaines d’autres pays contre les abus des extractions minières. Leurs voix ne sont pas entendues du gouvernement sénégalais, qui, financé par les banques assurant la construction de la centrale à charbon, n’écoute pas les revendications citoyennes.

La discussion qui suit cet exposé fait émerger la probable implication d’EDF dans ce projet. Une personne rapproche ce problème d’érosion de zones côtières avec des conséquences dramatiques dans les zones habitées de situations qui commencent à se produire chez nous, en Vendée par exemple.

Le deuxième atelier de l’après-midi va me transporter en Amérique du Sud. Beto, du Mexique, Anna-Maria, du Pérou, et Lesbia, du Guatemala, échangent sur les pratiques agricoles en cours dans leurs pays. Malgré les différences, on retrouve de la part des gouvernements un plus grand intérêt pour les villes que pour le monde rural, l’attrait pour l’économie libérale où la préférence est donnée à des produits d’importation plutôt qu’au soutien aux cultivateurs des petites parcelles en zone montagneuse.

Les associations présentes ont le souci d’une écologie intégrale alliant les pratiques culturales traditionnelles, la recherche de préservation de la biodiversité par la conservation de semences variées, l’encouragement à créer des coopératives ou des circuits commerciaux permettant de nourrir la population rurale tout en alimentant des marchés urbains.

Les trois acteurs dénoncent les pratiques de l’agro-industrie et des grandes propriétés, le rôle néfaste de la monoculture, et insistent sur les liens entre économie, écologie et état de la vie sociale.

Je suis toujours frappée par l’inventivité des jeunes salariés du CCFD pour l’animation, et par l’énergie et la puissance de conviction des partenaires accueillis.  Je vous souhaite d’avoir la possibilité de rencontrer ceux qui viendront dans votre région.

 

 

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« Il n’est de lumière que plurielle » :
interview de Mgr Jean-Paul
Vesco, évêque d’Oran (Algérie)

 

Mgr Jean-Paul Vesco a été reçu par le CCFD pour le Carême 2018 en tant que "grand témoin" dans le cadre de la mobilisation du CCFD-Terre Solidaire autour du thème « Tissons ensemble une Terre solidaire ».

Voici des extraits de l'interview qu'il a donnée au journal Faim et Développement Magazine.

 

FDM : Quelle est la situation de l’Église d’Algérie aujourd’hui ?

JPV- Aujourd’hui l’Église d’Algérie a deux poumons :

Il est essentiel pour elle d’être une Église citoyenne, engagée dans la société dans laquelle ses membres vivent. Aucun religieux n’est engagé exclusivement dans la communauté chrétienne. Pour être présents auprès de la société musulmane algérienne, les chrétiens ont développé de nouvelles activités, notamment les bibliothèques universitaires, fréquentées par près de 5 000 étudiants, et soutenues par le CCFD-Terre solidaire. Pendant un temps, ces bibliothèques ont été le seul accès sérieux aux ouvrages d’études. Elles sont aussi des lieux d’échanges et de rencontres impossibles autrement. C’est précieux, dans une société algérienne qui, comme la société française, est travaillée par des forces de division très fortes. Nous ne sommes pas là dans un objectif de prosélytisme. Ces expériences-là sont des expériences d’unité, qui s’appuient non sur ce qui nous divise, mais sur ce que chacun a de meilleur. Et je peux témoigner que l’Évangile y est pleinement vécu.

Le deuxième poumon de l’Église d’Algérie, c’est bien sûr la communauté chrétienne, qui a beaucoup changé depuis l’appel du cardinal Duval, archevêque d’Alger, à rester en Algérie, adressé en mars 1962 aux religieux et religieuses. Aujourd’hui les chrétiens sont en majorité d’origine subsaharienne. À la cathédrale d’Oran, pour le premier dimanche de l’Avent, sur 250 personnes, il n’y avait que 20 à 30 « visages pâles ». Parmi ces nouveaux fidèles, des étudiants venus de toute l’Afrique qui restent entre deux et trois ans, et dont le dynamisme nous porte.

Nous voyons maintenant beaucoup de chrétiens migrants bloqués dans leur projet de rejoindre l’Europe. Au début, nous avons vu arriver surtout des hommes, qui se cachaient, et venaient pour prier. Puis des femmes sont venues, de plus en plus nombreuses, et avec elles les enfants, ce qui est tout nouveau pour notre communauté. En 2013, 150 enfants sont nés dans notre diocèse. Ces chrétiens sont souvent dans une situation extrêmement vulnérable, et leur accueil représente un nouveau défi. Nous donnons une aide matérielle d’urgence, mais surtout beaucoup d’informations, de contacts.

L’accueil des migrants nous amène à travailler avec de nouveaux acteurs : des associations, mais aussi des individus, médecins, secrétaires... De belles rencontres se nouent, avec ces « héros ordinaires » algériens aidant des migrants mal perçus et sans aucun droit. Pour un pays qui s’est toujours considéré comme un pays d’émigration, dont les ressortissants se perçoivent souvent mal accueillis en France, c’est un défi de réaliser que l’Algérie est aussi en train de devenir un pays d’immigration.

 

FDM : Comment chrétiens et musulmans peuvent-ils vivre ensemble ?

JPV : Un jour des enfants ont inventé un jeu où je devais dire les paroles de la Fatiha en arabe. Ils espéraient que je ne m’en rendrais pas compte, mais serais sauvé quand même… Parfois cela m’arrive aussi d’entendre que je suis quelqu’un de bien, suivi d’un « dommage que tu ne sois pas musulman ». Je n’aime pas cela, parce que je sens que l’autre ne me respecte pas tel que je suis. Je n’ai pas envie de faire aux autres ce que je n’aime pas qu’on me fasse.

Pierre Claverie disait : « Il n’est d’humanité que plurielle ». J’y crois profondément. Certains chrétiens ou musulmans croient que le salut passe par la conversion de tous les habitants de la terre à leur religion. C’est un leurre qui nous mène souvent à la violence. Je crois que la différence religieuse n’est pas accidentelle et fait d’une certaine manière partie du plan de Dieu sur terre. Au lieu de se combattre, de gagner en puissance ou en parts de marché, le salut est pour moi de gagner en reconnaissance de l’autre, quand la rencontre avec la différence est vécue comme un enrichissement. Nous n’avons pas forcément à tout comprendre de la religion de l’autre, tout comme l’autre ne comprendra pas la manière dont nous vivons notre foi de l’intérieur. Mais quand la rencontre avec quelqu’un dont la foi est différente me touche, je perçois quelque chose de la révélation de Dieu.

Nous devons savoir regarder ce qui est beau. Cela ne signifie pas fermer les yeux sur la réalité, ou nier les problèmes. Mais nous devons éviter que l’un ne pollue l’autre systématiquement. Les belles choses font peu de bruit. Or ce sont elles qui nous font vivre. Ce n’est pas de la naïveté. La naïveté pour moi est d’imaginer qu’on va régler les problèmes en dressant des murs.

Partout des voix se font entendre pour dire que chrétiens et musulmans ne peuvent pas vivre ensemble. Je rentre du Mali, où les chrétiens ne représentent que 1 à 2% de la population, mais jouent un rôle très important. Là-bas j’ai vu un couple mixte musulman et chrétien, dont les enfants sont majoritairement chrétiens et d’autres musulmans. Je ne nie pas toutes les difficultés de la coexistence, mais cela existe. Et si c’est possible, c’est qu’il y a un chemin. L’Islam est, il ne disparaitra pas. Nous devons vivre le meilleur ensemble car nous ne pouvons pas divorcer.

Nous croyons que nous sommes là d’abord pour témoigner d’un Dieu d’amour qui est à l’œuvre dans le monde pour le salut de tous les hommes de bonne volonté, quelles que soient leur race et leur religion. Sûrs de tout cela, le Seigneur fera ce qu’Il voudra.

 

Propos recueillis par Anne-Isabelle Barthélémy (extraits de Faim et Développement (magazine du CCFD-Terre Solidaire) - février 2018

 

 

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Ma tendresse d’aujourd’hui
(poème de Véronique Laurès)

 

Ma tendresse d’aujourd’hui ressemble à celle d’hier,

Mais elle aime trop la vie pour regarder derrière,

Elle aime trop la vie pour se figer ainsi.

Ma tendresse d’aujourd’hui humblement a grandi.

 

Ma tendresse d’aujourd’hui coule tel un murmure,

Un murmure qui voudrait abattre tous les murs :

Remparts de l’égoïsme et de l’indifférence,

De la haine vivace, de l’abjecte violence.

 

Ma tendresse d’aujourd’hui, c’est un chant insolite,

C’est le rythme d’un cœur qui parfois bat trop vite,

C’est un cœur qui prend feu à la moindre étincelle,

Pourvu qu’elle soit vraie, pourvu qu’elle soit belle.

 

Ma tendresse d’aujourd’hui, c’est un regard qui brille,

À l’idée d’une vaste et unique famille,

À l’idée que le sang qui s’écoule en mes veines

Est le même que le sang de toute personne humaine.

 

Ma tendresse d’aujourd’hui, c’est un cœur en lambeaux,

Lorsque ta différence côtoie l’échafaud,

Quand ton cœur est blessé, quand ton corps est meurtri,

Quand tu n’as pas le pain de ce qui réjouit.

 

Ma tendresse d’aujourd’hui se conjugue au présent,

Attentive aux richesses surgies de l’instant,

À ce qui ne s’achète, à ce qui ne se voit,

Aux bras que l’on se tend pour un noble combat.

 

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Mission de sensibilisation à la locomotion au Burkina Faso
du 14 au 24 février 2018
par Flora Touja et Carine Briant

 

Nous nous sommes rencontrées en 2014 lors de notre formation d’instructrice de locomotion. Toutes deux issues du secteur paramédical, nous sommes animées par le désir d'aider les autres et de se sentir utile. C’est au cours de simples échanges qu’est née l'envie de réaliser une mission humanitaire. Afin de joindre le geste à la parole, nous décidons de contacter la Commission de Solidarité Internationale de l’association Voir Ensemble, dont le responsable, Yves Dunand, s’est tout de suite montré bienveillant à notre égard. Un projet s'est alors dessiné au Burkina Faso en lien avec L’UN-ABPAM. Très rapidement, il a fallu organiser notre venue à Ouagadougou. Grâce à une importante motivation et implication de tous les protagonistes, la mission humanitaire a pu prendre forme. L’objectif commun était de favoriser l'échange de connaissances et de savoir-faire afin d'optimiser le confort et l'autonomie dans les déplacements des personnes déficientes visuelles burkinabé. Dans cette optique, notre action s'est centrée sur la sensibilisation des enseignants de l’UN-ABPAM et le soutien du rôle des deux professionnelles Justine et Bibata ayant déjà bénéficié d'une première approche à la locomotion.

Dès notre arrivée à l’aéroport le 14 février 2018, nous avons été chaleureusement accueillies par Suzanne Tapsoba, la directrice de l’école. Les deux premières journées ont été l'occasion de s’imprégner de la vie locale et de rencontrer les professionnels de l’UN-ABPAM afin de préparer le travail de la semaine suivante. C’est ainsi que nous avons affiné le programme de « formation/sensibilisation à la locomotion » avec Justine. Nous vivions aussi nos premiers contacts avec les enfants. Certains n’étaient pas chaussés, d’autres portaient un bel uniforme, mais tous ont fait preuve d’une politesse et d’un respect exemplaires. Un modèle éducatif différent de la France mais qui montre l’implication des enseignants et la volonté de toujours faire au mieux.

Au cours de notre première journée, nous avons pu assister à une cérémonie de remerciements pour Rama la Slameuse qui venait de faire don de denrées alimentaires. Nous avons ainsi été les témoins privilégiés d’un spectacle mêlant danse, percussions et discours préparé par les enfants et leurs enseignants afin de remercier la chanteuse. Nous avons appris à cette occasion que divers bienfaiteurs œuvrent pour cette école.

La semaine suivante nous avons été accueillies par Adeline, Adama, Mady et Sylvie, les enseignants spécialisés retenus pour la formation, sans oublier Justine et Bibata, les référentes de la locomotion. Cette semaine du 19 au 23 février a été organisée autour de différents thèmes et nous avons fait le choix de travailler sur la base de mises en situation et d'expérimentations afin de permettre aux professionnels de mieux comprendre les différentes atteintes visuelles et leur impact dans les déplacements. La photo ci-contre montre le travail effectué sur le maniement de la canne.

 

Démonstration de l'utilisation de la canne blanche à quatre enseignants

Les thèmes suivants ont donc été abordés : la malvoyance et ses différentes atteintes, la technique de guide, l'éveil et le développement des sens compensatoires et du potentiel visuel, la représentation mentale spatiale, les protections manuelles pour les déplacements en intérieur ainsi que les rôles et l'utilisation de la canne blanche. Au cours de ces différentes journées, des supports théoriques ont pu être co-construits avec les enseignants.

 

La dernière journée fut consacrée à la mise en pratique des différents apprentissages en réalisant des séances auprès de 4 enfants déficients visuels, permettant ainsi de faire des liens avec la théorie et d’amorcer les adaptations. Évidemment le temps dont nous disposions ne nous a pas permis d’aborder les thèmes en profondeur ni de présenter les différentes pédagogies et adaptations. Cependant, notre intervention a suscité, nous l’espérons, un intérêt pour la locomotion. Les enseignants étant déjà sensibilisés au handicap visuel pour l’aspect scolaire, ils peuvent à présent mettre en pratique leurs connaissances et développer la logique de la locomotion pour proposer à chaque enfant un accompagnement plus global tout en tenant compte de leur individualité.

Mise en place d'une bande noire sur une marche d'escalier

Cette dernière semaine fut également l'occasion de travailler sur le thème de l'accessibilité avec la mise en place de marquages visuels et tactiles au sein de l’UN-ABPAM, notamment pour les escaliers et les portes, comme le montre la photo ci-jointe. Enfin, grâce à de nombreux dons, du matériel a pu être remis à l'association, à savoir : des cannes blanches, un vidéo-agrandisseur, des casquettes, des verres teintés, des lunettes de simulation, des plans tactiles et une planche pour réaliser des dessins en relief. Une maquette en bois représentant l'établissement a également été réalisée avec les enseignants. Ce nouvel outil pourra permettre aux enseignants d'appréhender l'espace de l'école avec les jeunes d'une autre façon. Dans un souci d'adaptation et d'accessibilité, des contrastes visuels et tactiles ont été disposés afin de distinguer les différents bâtiments et leurs fonctions.

Nous tenons à finir cet article avec des remerciements. Nous souhaitons souligner plus particulièrement la générosité des personnes ayant participé à la cagnotte Leetchi, merci à chacun d'entre vous. Merci aux professionnels de l’UN-ABPAM, à la directrice ainsi qu'au président de l'association pour leur investissement, leur accueil, leur générosité et le partage de leur pratique. Merci infiniment aux membres de la Commission de Solidarité Internationale de Voir Ensemble sans qui rien n’aurait été possible. Merci aussi à l'atelier du Haut des Vannes et à l’IRSA pour le don de cannes et de matériel. Merci également à Moumouni et Laurent pour nous avoir montré la beauté et les valeurs du pays « des hommes intègres ». Enfin, nous remercions nos familles qui nous ont soutenues tout au long de cette mission d’une grande richesse professionnelle et humaine.

 

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À la découverte de l'Union Nationale des Associations Burkinabé pour la Promotion des Aveugles et Malvoyants
(UN-ABPAM)

 

NDLR : À noter que la CSI a soutenu cette association en finançant les répétiteurs de l'école de Ouagadougou entre 1994 et 2010 ainsi qu'une mission de formation des enseignants animée par Cécile Tardieu, enseignante spécialisée, en 2006-2007. Nous avons aussi financé la réfection de centres d'alphabétisation et l'achat d'une thermoformeuse pour l'école de Bobo-Dioulasso, et la Commission Sports Loisirs et Culture de Voir Ensemble (CNSLC) a financé pour sa part la réfection du plateau de sport de l'école de Ouagadougou.

 

L'UN-ABPAM est le regroupement des associations de promotion des personnes handicapées visuelles au Burkina. Elle a son siège à Ouagadougou, au quartier Gounghin, et compte 65 associations membres se trouvant dans 30 provinces sur les 45 que compte le pays. Avant 2008, elle s'appelait ABPAM.

Elle a été créée en octobre 1979 par un groupe d'aveugles de Ouagadougou. L'UN-ABPAM, qui est reconnue d'utilité publique, a pour objectif d'œuvrer à l'inclusion socio-économique des personnes handicapées visuelles du Burkina Faso et à leur épanouissement culturel, sportif et artistique.

Les principales activités de l'UN-ABPAM visent à :

- sensibiliser les personnes handicapées visuelles, leurs familles et les populations sur la problématique de la cécité ;

- former dans divers domaines : mobilité et orientation, artisanat, agriculture, élevage, alphabétisation, gestion ;

- promouvoir l'éducation et la scolarisation des jeunes handicapés visuels ainsi que l'inclusion scolaire ;

- promouvoir l'inclusion professionnelle des personnes handicapées, y compris par l'auto-emploi ;

- promouvoir les actions des femmes ainsi que des jeunes handicapés visuels et renforcer leurs capacités, notamment par le microcrédit ;

- généraliser la pratique du braille parmi les non-voyants ;

- favoriser l'accès des personnes aveugles à l'éducation physique, au sport et à la culture ;

- favoriser, en réseau avec d'autres organisations, la mise en œuvre des droits humains, particulièrement les droits des personnes handicapées afin qu'elles parviennent à leur inclusion dans la société.

Les membres de base de l'UN-ABPAM sont les associations. L'Assemblée Générale élit les membres du Bureau National (au nombre de 16) et met en place les bureaux exécutifs des comités spéciaux qui sont le Comité National des Femmes Aveugles (CNFA) et le Comité National des Jeunes Aveugles (CNJA).

Chaque association membre est autonome dans sa gestion mais doit respecter les statuts de notre Union. Elle se constitue, se fait reconnaître par les autorités de sa localité et demande à adhérer à notre organisation.

Le président du Bureau National et ceux des comités spéciaux (CNFA et CNJA) sont élus pour un mandat de 4 ans renouvelable une seule fois. Cette disposition existe dans nos textes depuis 2008 ! Des personnes ressources (au nombre de 5) sont désignées pour constituer le Comité des Sages.

Nous avons découpé le territoire en 5 zones dirigées par des secrétaires de zone qui sont d'office membres du Bureau National pour assurer une représentativité des régions. Les associations d'une même province se constituent en Union provinciale.

Nous sommes impliqués au sein de la société civile : l'UN-ABPAM est membre actif du Réseau National des Organisations de Personnes Handicapées (RENOH), de l'Union Africaine des Aveugles (UAFA / AFUB), de l'Union Francophone des Aveugles (UFA), de l'Union Mondiale des Aveugles (UMA / WBU)…

L'un-ABPAM dispose d'un centre d'hébergement au siège à Gounghin et d'un centre d'accueil au Village Nongtaaba à la périphérie de la capitale.

 

Nos services:

- Une école de jeunes aveugles à Ouagadougou comptant environ 63 élèves en primaire dans ses classes dites spéciales. Elle assure le suivi de beaucoup d'autres élèves inscrits dans divers établissements de la ville, suivant les cours avec les élèves voyants, soit 10 élèves en primaire, 52 dans le secondaire. 10 étudiants handicapés visuels sont inscrits dans les universités de Ouagadougou.

- Une école de jeunes aveugles à Bobo-Dioulasso (ABPAM Espérance) : 38 élèves en primaire, 21 en secondaire. La première promotion passe le bac cette année avec une candidate.

- Un centre de formation au village de Nongtaaba.

 

Très peu de nos élèves ont réussi à faire des études avancées. Beaucoup n'ont pas pu franchir le cap du CM2 et ont dû rejoindre leur communauté. Nous en rencontrons lors de nos visites qui ont rejoint les associations locales et qui sont devenus des mères et des pères de famille dont certains gèrent, bon an mal an, des activités génératrices de revenus. Ceux qui ont atteint le niveau 3ème sont devenus animateurs de nos centres d'alphabétisation en braille.

Une trentaine de privilégiés ont été recrutés en 2014 comme agents de bureau par le Ministère de l'éducation. Il y a également quelques diplômés qui sont sur le marché de l'emploi.

Le management de ces centres comprend des aveugles et des valides à tous les niveaux. Ensemble, ils forment un tandem pour travailler à la promotion de la personne handicapée visuelle.

 

Nos partenaires nationaux sont l'administration à travers notre ministère de tutelle, le ministère de la femme, de la solidarité nationale et de la famille (MFSNF), le ministère de l'éducation nationale (qui nomme nos enseignants), le ministère chargé des droits humains…

Nous sommes également épaulés par le Lion's Club, le Rotary Club et des donateurs parfois anonymes.

Nos partenaires internationaux, qui interviennent essentiellement pour la scolarisation des enfants, sont : un groupe d'amis belges constitués en association dénommée ABPAM Belgique, Sensorial Handicap Corporation, une ONG belge, Light for the World, une ONG autrichienne, l'Association Sœur Emmanuelle, Lilian Fonds.

Nos soutiens se font de plus en plus rares et nous sommes obligés de comprimer nos charges de fonctionnement en limitant nos ressources humaines, avec pour conséquence la faiblesse de nos interventions sur le terrain. Il nous faut relever de nombreux défis et nous avons besoin du soutien de tous pour parvenir à l'inclusion des personnes handicapées dans la société. Les textes seuls ne suffisent pas, il faut que toute la communauté s'engage.

Notre contact téléphonique : +226 34 33 86.

Notre adresse mail : abpambf_2007@yahoo.fr

 

Présentation du nouveau président, Christophe Oulé :

« Je suis né en 1960 à Zaba dans la province du Nayala.

J'ai exercé le métier d'ingénieur en génie civil (option bâtiment) avant de perdre la vue en 2003.

L'année suivante, je suis venu à l'ABPAM pour ma réadaptation. J'y ai suivi une formation en braille afin de pouvoir continuer à lire malgré mon handicap et une formation en mobilité et activités de la vie journalière pour me déplacer et acquérir une certaine autonomie.

Aujourd'hui, je suis formateur en informatique adaptée au handicap visuel et président de l'UN-ABPAM depuis octobre 2016. Auparavant, j'en étais le secrétaire général (de 2008 à 2016).

Je suis marié et père de deux filles. »

 

Extrait de l'interview donnée par Christophe Oulé au journal Faso Amazone le 11 mars 2017

 

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Rapport sur la culture d'un champ de maïs
au Congo Brazzaville
par l'association "Action des Femmes Aveugles pour le Développement" (AFAD)

 

Le témoignage que nous apporte ci-après Madame Thérèse KAMANGO NTOYO sur l'action conduite par son association, dans la région de Madingou au Congo, est révélateur de l'intérêt des microprojets que peut soutenir la CSI. Il atteste de la réussite d'un projet d’exploitation d'un champ de maïs qui a permis de générer emplois et revenus pour des femmes aveugles et malvoyantes vivant dans l'exclusion du fait de leurs incapacités supposées.  

Nous vous livrons ci-dessous une adaptation synthétique du rapport, accompagné de photos, dont nous tenons à souligner la qualité exceptionnelle, tant pour son exhaustivité que pour la précision des explications et des justifications chiffrées des dépenses et des résultats obtenus. Ce compte-rendu fidèle et sincère, relatant les satisfactions et difficultés, montre le sérieux de cette opération qui mérite pérennisation et modélisation.

 

Le présent rapport rend compte du travail effectué, des difficultés rencontrées et des résultats obtenus.  Tout un travail de préparation, avec Comité de pilotage, en lien avec l'antenne AFAD de Madingou, avait permis de cerner le projet dans ses composantes financière, matérielle et opérationnelle, avec le concours actif de Madame LOUBA Charlène, responsable locale de l'AFAD.

Un suivi constant et une évaluation ont été diligentés par l'association au cours de plusieurs missions afin d'assurer le bon aboutissement du projet.  Celui-ci s'est déroulé sur la période d'août 2016 à août 2017, date de la quatrième mission, au cours de laquelle la responsable d'AFAD-Madingou a fait savoir à la délégation que le maïs récolté était en train d'être vendu au marché de Madingou. Les émoluments des non-voyants et des guides ont ainsi pu être versés, soit 250 000 F CFA (380 €) pour les non-voyants et 50 000 F CFA (75 €) pour les guides.

 

I. Mise en œuvre du projet

La mise en œuvre du projet portait sur les activités suivantes :

1. Le dessouchage du champ. Madingou est une zone de savane arbustive, c’est pourquoi il était important de dessoucher ces arbustes avant de faire passer le tracteur pour le labour. Cette activité a été menée par le groupement du village du 17 au 25 septembre 2016.

2. Le labour et la pulvérisation. Le labour et la pulvérisation du champ de 4 hectares ont été réalisés avec le tracteur d'un particulier qui entreprend des activités agro-pastorales dans la contrée de Madingou. Le labour a été effectué du 9 au 15 octobre 2016, et la pulvérisation un mois plus tard, du 20 au 24 novembre 2016. 

3. Les semailles. La mise en terre des grains de maïs a été réalisée par le groupement du village un mois après la pulvérisation. Huit jours durant, ces femmes et ces hommes ont consacré leur temps à semer du maïs dans notre champ de 4 hectares. Les semailles ont démarré le 28 décembre 2016 et pris fin le 7 janvier 2017.

4. Le désherbage. Comme il avait été convenu, le groupement a exécuté ce travail de désherbage du champ malgré le retard dû aux multiples préoccupations, surtout en cette période où chacun veut terminer au plus vite ses propres besognes.  Ainsi, le groupement s'est attelé à désherber notre champ du 27 mars au 5 avril 2017.

5. La moisson / récolte. La production du maïs attendue dans notre champ est destinée à la vente. Il fallait donc bien sécher le maïs avant de le récolter. C’est pourquoi nous avons passé beaucoup de temps avant de lancer la récolte. Travail moins fastidieux, il a été exécuté par les non-voyants et les guides ainsi que certaines femmes du groupement qui avaient manifesté la volonté de nous aider. C’est à partir du 23 mai 2017 que nous avons commencé la récolte du maïs.

Jeune garçon en train d'égrainer
 un épi de maïs

6. L’égrainage. Le maïs récolté devait être égrainé avant d’être mis dans des emballages, c’est-à-dire dans les sacs de 50 kilos réservés à cet effet. Ce travail a été réalisé par les non-voyants et les guides. Bien que l’égrainage ait pris du temps, c’était aussi une façon d’occuper les non-voyants le plus souvent oisifs et manquant d’activités. Ce travail d’épluchage et d’égrainage a été réalisé en juin 2017, comme le montre la photo ci-contre sur laquelle on voit un jeune garçon égrainer les épis de maïs sur une bâche.

 

7. Le conditionnement. Le maïs égrainé a été mis dans des sacs de 50 kilos, comme on le voit sur la photo ci-contre. Ici également, nous avons loué les efforts des non-voyants et des guides qui n’ont jamais baissé les bras pour arriver au terme de nos activités. Cette opération, réalisée entre fin juin et début juillet 2017, nous a permis de connaitre la production de notre champ. Contrairement à nos prévisions qui étaient de 84 sacs de maïs de 50 kilos, la quantité produite par les 4 hectares de notre champ a été de 77 sacs de 50 kilos.

8. Le transport de la marchandise au dépôt du marché. La production étant mise dans les emballages et la quantité connue (77 sacs de maïs), il fallait la transporter au marché de Madingou pour la vente.

Homme debout derrière un gros sac de maïs

9. La vente du produit au marché. Le 19 juillet 2017, le maïs a commencé à être vendu en gros (par sac) et au détail (dans des petits récipients) au marché de Madingou. Cette dernière étape s'est échelonnée de juillet à septembre 2017.

 

II. Difficultés rencontrées

Dans la réalisation du projet, nous avons connu quelques difficultés qui en ont perturbé l'exécution par rapport au calendrier agricole de notre localité. À Madingou, le labour commence entre juin et juillet. Or, nous avions lancé les activités à la fin du mois de septembre 2016. Ce retard a occasionné un décalage dans le cours normal des activités. Par exemple, au moment où l'on était en train de faire le labour, les autres plantaient ou semaient.

Nous avons connu aussi des difficultés pour acheminer les produits par camion du fait de l'insécurité qui bloque de temps en temps la circulation dans le département du Pool.

III. Résultats obtenus

1. Budget prévisionnel du projet :

1.1. Frais d'installation du projet. Ces frais comprenaient la location du champ (4Ha), le dessouchage et les opérations de labour et pulvérisation pour un montant de 1 051 €.

1.2. Coût d'exploitation (achat matières premières, salaires et autres frais) pour un montant de 1 677 €. 

Soit un projet de 2 729 €, financé à hauteur de 2 206 € par la CSI de Voir Ensemble, et 442 € en fonds assurés par l'AFAD.

 

2. Activités réalisées

La récolte du maïs sur les 4 hectares a donné une production de 77 sacs de maïs sur les 84 espérés.

Sur ces 77 sacs de maïs, 72 sacs ont été vendus en gros à raison de 30.000 F CFA (45 euros) le sac et 5 au détail.

Le total a donné une somme de 3 559 €.  Une fois défalqués les frais de stockage, il nous restait 3 495 €.

Ainsi, le projet a généré un bénéfice de 848 €.

L'écart de 7 sacs de maïs constaté entre la production attendue et la production obtenue peut être expliqué en partie par le retard avec lequel nous avons fait les semailles ; car en janvier nous sommes en petite saison sèche et la pluviosité diminue. Or, le maïs est une plante qui demande de l’eau pour sa croissance.  D'autre part, la consommation du maïs frais par les non-voyants et les guides peut aussi expliquer la baisse de la production.

IV. Actions correctrices

Au regard des difficultés rencontrées et du rendement atteint par rapport aux prévisions, les approches de solutions suivantes ont été proposées pour les prochaines activités agricoles :

- disposer des fonds à temps afin de mener les activités en fonction du calendrier agricole ;

- contacter au moins deux ou trois prestataires pour ne pas connaître des perturbations dues au retard dans l'exécution du travail ;

- éviter de trop consommer le produit qui est destiné à la commercialisation pour ne pas fausser les indicateurs de départ ;

- doter le bureau d’AFAD-Madingou d'un ordinateur afin de permettre les envois des documents sur des supports ou par Internet, ce qui nous évitera les voyages par camion, sources d'insécurité.

Conclusion

L'exploitation du champ de maïs à Madingou a donné plus ou moins les résultats escomptés malgré les difficultés rencontrées. Le bureau d'AFAD-Madingou, à qui la mission avait été confiée par le comité de pilotage pour la mise en œuvre du projet, a été à la hauteur de sa tâche. Pour la suite du projet, les mêmes stratégies seront utilisées en tenant compte des insuffisances remarquées et des difficultés rencontrées. Enfin, les non-voyants de Madingou se réjouissent de ce projet, qui commence déjà à porter ses fruits du fait qu'ils ont pour la première fois apporté un peu d'argent à leur famille, et qui va améliorer un tant soi peu la vie des non-voyants de Madingou longtemps laissés dans les oubliettes.

Pour ce qui est de la deuxième étape du projet, qui a déjà commencé d'ailleurs, nous vous assurons cette fois-ci de vous produire les rapports dans des délais relativement courts.

 

Fait à Brazzaville, le 17 novembre 2017

La Présidente de l'AFAD,

Thérèse KAMANGO NTOYO

 

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École guinéenne : un chemin semé d’embûches
pour les déficients visuels
par Aboubacar Somah Bokoum

 

La Guinée Conakry compte de nos jours plusieurs dizaines d’élèves et d’étudiants déficients visuels. Malgré leur handicap et des conditions d’apprentissage parfois difficiles, ces personnes étudient et arrivent à décrocher des diplômes de fin d’études supérieures. Elles ont toutes un rêve, celui de décrocher un bon emploi à la fin de leur cursus. À travers cet article de Aboubacar Somah BOKOUM, étudiant non-voyant en licence 3 information communication à l’université Lumière Lyon 2, nous vous amenons au cœur du quotidien des déficients visuels scolarisés dans ce pays d’Afrique occidentale, de l’école primaire à l’université.

 

L'école de Sogué.

Nous sommes à l’école Sogué des aveugles et malvoyants. Située dans l’enceinte de la cité de solidarité, dans la commune de Ratoma en haute banlieue de Conakry, cette école spéciale compte 6 salles de classe, deux latrines et un bureau. Elle accueille actuellement 37 élèves. Pour la plupart des déficients visuels scolarisés en Guinée, c’est ici que commencent les études. « Notre école est un centre spécialisé de formation qui a vu le jour en 2002 avec un effectif de cinquante élèves. Elle est le fruit d’une collaboration bilatérale entre le Luxembourg et la Guinée à travers le ministère de l’action sociale, de la promotion féminine et de l’enfance », explique Sécouba CAMARA, le Directeur.

L’enseignement en braille pratiqué dans cette école demande un certain nombre d’outils spéciaux, parmi lesquels figurent notamment du matériel informatique comme les ordinateurs, les lecteurs d’écran, ou encore les machines à lire. Mais dans cet établissement, en raison d’un manque de moyens financiers, élèves et instituteurs sont contraints d’utiliser des instruments traditionnels comme les tablettes braille, les poinçons ou les cubarithmes. Au moment où nous nous sommes rendus sur les lieux, l’école ne disposait que d’une machine Perkins qui chaque matin faisait le tour des six classes, obligeant ainsi les enseignants à adapter leur emploi du temps. Et cette situation est, pour de nombreux écoliers, un véritable obstacle à l’apprentissage. « Il nous arrive parfois de nous présenter en classe à 8h et de perdre plus d’une heure parce que tout simplement l’outil dont on a besoin est dans une autre salle de classe », témoigne Salimatou SAVANE, candidate à l’examen d’entrée au collège. « Ici poursuit-elle, c’est le premier arrivé qui est le premier servi. Cela a un impact majeur sur notre formation. Moi j’ai un examen national à la fin de l’année scolaire, mais je ne peux malheureusement pas étudier au même rythme que les candidats des établissements normaux, alors que nous aurons les mêmes sujets. Il s’agit là d’une stigmatisation » déplore cette adolescente.

À l’image des autres écoles du pays, le centre Sogué enseigne un programme élaboré par le ministère de l’Enseignement Pré-universitaire, selon Sékouba CAMARA, le Directeur. « Dès leur première année ici les élèves sont initiés à l’écriture, à la lecture et au langage parlé. Au fur et à mesure qu’ils avancent, d’autres disciplines s’ajoutent conformément au programme de la république ».

Le 20 juin 2016, l’école Sogué avait présenté trois candidats à l’examen d’entrée au collège, mais seul un parmi eux était parvenu à décrocher le précieux sésame. Les élèves que nous avons rencontrés imputent cet échec à un manque de soutien de la part du gouvernement guinéen. Cependant, le directeur de l’établissement rétorque que des dispositions sont prises chaque année pour porter assistance aux postulants à l’examen. Et pourtant, malgré les mesures d’accompagnement dont parle Sékouba CAMARA, cette année le centre Sogué n’aura pas de candidat aux examens de fin d’année car les élèves qui ont échoué en 2016 ont opté pour l’abandon face à ce qu’ils qualifient d’inertie des autorités en charge de l’éducation locale.

 

Des écoles intégratrices pour le secondaire.

Une fois le cap du Certificat d’Étude Primaire (CEP) franchi, les élèves sont admis dans des écoles dites intégratrices, comme l’école La Source, située à quelques kilomètres du centre Sogué. Cette année, parmi les candidats de ce temple du savoir au baccalauréat figurent deux non-voyantes. Pour Fatoumata Djaraye DIALLO et Aïssatou BAH, les débuts dans cette école n’ont pas été roses. Mais avec l’appui de leurs camarades, elles ont pu s’intégrer. « À mon arrivée, raconte la première, je ne connaissais personne. Je venais alors de passer d’un établissement de 37 élèves à un autre de plus de 2000 élèves. Tous les professeurs se demandaient comment ils allaient pouvoir travailler avec nous parce qu’ils n’avaient pas eu affaire à des élèves non-voyants. Il nous a fallu du temps pour nous habituer à ce nouvel environnement, mais aujourd’hui en ce qui me concerne, tout se passe à merveille », fait remarquer la lycéenne avec un large sourire. Même son de cloche chez sa camarade.  

À en croire les professeurs qui dispensent des cours à La Source, l’intégration de ces élèves se passe sans difficulté. Pour faciliter l’apprentissage des déficients visuels, Moussa CAMARA, chargé du cours de géographie en terminale sciences sociales (terminale littéraire en France) a décidé d’adapter sa façon d’enseigner. « Quand j’écris les leçons au tableau, je les dicte simultanément aux deux élèves non-voyantes qui sont dans ma classe. Ainsi, elles peuvent elles aussi noter comme les autres. Et à la fin de chaque évaluation, l’école fait appel à des enseignants du centre Sogué qui viennent transcrire les copies pour qu’on puisse les corriger. C’est cette méthode qui est appliquée par tous les chargés de cours à l’école La Source ».

 

De gros obstacles subsistent.

Cependant, Mamadou Bobo BARRY, élève de la dixième année à l’école moderne de Guinée, l’équivalent de la 3e en France, n’est pas d’accord avec l’affirmation selon laquelle tout se passe bien pour les handicapés visuels dans les écoles intégratrices. Ce collégien regrette le fait que ses professeurs n’aient pas de connaissances de l’alphabet braille. Pour lui, cette situation est à l’origine de nombreux retards dans la correction de ses copies après les examens. « À l’issue de chaque épreuve, il faut qu’un enseignant de l’école Sogué vienne transcrire les copies en noir. Mais ces enseignants ne sont pas toujours disponibles, ou parfois ils ne sont pas payés à la fin de leur prestation, et ils refusent de revenir ». Dans de tels cas de figure, nous sommes obligés d’attendre que les professeurs corrigent les copies de nos camarades voyants pour leurs lire les nôtres. Cela cause un double stress », considère cet adolescent.

Autre difficulté rencontrée par ces élèves : le retard du payement de leurs frais de scolarité. En raison de l’effectif pléthorique enregistré dans les écoles publiques guinéennes (environ 70 personnes par classe), nombreux sont les déficients visuels qui optent pour l’enseignement privé en vue de faciliter leur intégration au collège. Mais ils se retrouvent généralement très vite confrontés au coût élevé des études dans le privé. C’est ainsi qu’un nombre important d’écoliers se tourne vers des associations pour payer leur formation. Environ une dizaine de déficients visuels est prise en charge par l’ONG Guinée Solidarité. Pour bénéficier du soutien de cette organisation, il faut notamment que le demandeur de la bourse soit titulaire d’un Certificat d’Étude Primaire, et qu’il ait de bonnes notes. Tous les dossiers de demande de prise en charge sont examinés dans un premier temps par l’antenne locale de Guinée Solidarité, avant d’être transmis aux partenaires de l’ONG disséminés dans plusieurs villes françaises. Si la requête est validée, la structure se charge de trouver un parrain au demandeur qui peut alors recevoir jusqu’à 550 000 francs guinéens par mois, soit 55 euros.

Seul problème avec ce parrainage, la lenteur de la procédure. Conséquence, les administrateurs des écoles intégratrices ont du mal à percevoir leur argent. « Parfois, nous restons plus de trois mois sans être payés », nous a confié le Directeur général de l’école moderne de Guinée, Salifou SYLLA. De l’avis de plusieurs de ces handicapés, l’État guinéen devrait prendre en charge leurs frais de scolarité. Le Directeur national de la protection et de la promotion sociale Moussa TRAORÉ rétorque que les personnes porteuses de handicap devraient chercher à être plus autonomes. Il soutient que le gouvernement ne paye pas les études des autres enfants scolarisés dans le privé, il n’y a donc aucune raison qu’il paye celles des déficients visuels.

George Sagna NIENG de Guinée Solidarité pointe quant à lui un doigt accusateur sur les parents d’élèves qui à son avis ne soutiennent pas leurs enfants jusqu’au bout.

 

Enseignement supérieur et perspectives d'emploi.

Les universités guinéennes accueillent présentement six déficients visuels selon le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique.  Parmi ces étudiants, quatre suivent un cursus en journalisme. C’est le cas de Bemba SYLLA, étudiant en quatrième année de licence presse écrite à l’Institut Supérieur de l’Information et de la Communication de Kountia à l’Est de Conakry. La principale préoccupation de ce non-voyant qui frise la trentaine est comment obtenir un bon emploi. « Trouver un travail pour un non-voyant relève d’un véritable parcours du combattant en Guinée », fait remarquer ce journaliste en herbe. Il poursuit : « un nombre important de mes aînés ont reçu leur diplôme de fin d’étude depuis des années, mais leur quête de travail est jusqu’à présent sanctionnée par un échec. Cela ne me donne pas d’espoir ».

Bacary MANSARE est titulaire d’un master en droit des affaires depuis 2009, et d’un diplôme en langue anglaise. Mais même avec ces diplômes, il ne parvient pas à décrocher un emploi. Il parle d’un manque de volonté politique. « La Guinée a ratifié la convention 159 de l’Organisation des Nations Unies relative à l’insertion professionnelle des personnes handicapées, mais l’application de ce texte par les acteurs de l’administration publique fait défaut. Moi c’est donc l’État que j’accuse, car des pays voisins comme le Sénégal arrivent à mieux gérer le problème du handicap avec pratiquement les mêmes ressources financières. Dans ces pays les personnes handicapées en général, et les déficients visuels en particulier, travaillent, pendant qu’ici la plupart des personnes de cette couche sociale vivent de la mendicité. C’est vraiment dommage », confie ce diplômé en guise de conclusion.

Malgré cette situation, ces personnes restent optimistes. Elles rêvent de décrocher de bons emplois et de ne plus dépendre de la charité. Elles demandent aux autorités guinéennes de prendre des dispositions pour leur faciliter la tâche.

 

Adapté d'un article publié en ligne par

FAF   APRIDEV Rhône-Alpes le 19 mai 2017

 

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Bénin : Remise d'équipements aux CPSA
de Cotonou et de Parakou

 

Le ministre des Affaires sociales et de la Microfinance, Bintou Chabi Taro Adam, a procédé, ce mardi 6 février au Centre de Promotion Sociale des Aveugles et Amblyopes (CPSA) de Sègbèya, à la remise officielle de matériels aux personnes handicapées de Cotonou et de Parakou. Le geste s’inscrit dans le cadre du programme de protection des couches vulnérables initié par le régime du Nouveau départ.

Le ministère en charge des Affaires sociales et de la Microfinance manifeste sa solidarité à l’endroit des personnes handicapées par la dotation de matériels didactiques, de mobiliers et d’équipements informatiques, de bureaux et de logiciels spécifiques au profit des CPSA de Cotonou et de Parakou et aux Cours éducatifs installés au niveau des Centres de promotion sociale.

D’un coût global de plus de 80 millions de francs CFA, ce don permettra de renforcer les capacités de l’administration desdits centres et d’améliorer les conditions de travail du personnel administratif.

« À la suite des centres de formation professionnelle des personnes handicapées et des élèves sourds, c’est au tour des centres de promotion sociale des aveugles et amblyopes de notre pays de bénéficier de l’attention du gouvernement à travers ces équipements », souligne le ministre en charge des Affaires sociales, Bintou Chabi Taro Adam.

Le CPSA de Sègbèya a aussi reçu un lot de produits alimentaires destinés à accompagner ses efforts dans la prise en charge alimentaire des groupes cibles. À cela s’ajoute la remise d’ordinateurs portatifs spécialisés à dix étudiants aveugles du CPSA de Sègbèya et de Parakou. Un geste qui a pour but de faciliter leurs études en harmonie avec l’évolution technologique et les défis professionnels.

Les Cours éducatifs ont reçu des lots d’équipements en vue d’un meilleur encadrement des enfants vulnérables dans les domaines de la couture, de la coiffure et de la fabrication du savon.

Les unités de formation des Cours éducatifs ne sont pas oubliées dans le cadre du geste de solidarité du gouvernement. Elles sont au total quinze ciblées dans tout le pays à recevoir des équipements :  machines à coudre, machines à surfiler, presses à boutons, machines à pose de pierre, casques à chaud et à froid, mobiliers et outils pour différentes branches de formation.

Pour la directrice des Affaires sociales, Baboni Yacoubou Mèmouna Sinimbou, cette remise de matériels est un acte de haute portée sociale. « Il s’agit d’un investissement dans l’homme, dans sa construction et dans l’affirmation de sa dignité », apprécie-t-elle.

Malgré les équipements mis à la disposition des bénéficiaires, beaucoup de doléances restent encore à satisfaire. Le secrétaire général du Syndicat national des travailleurs des centres de promotion sociale des aveugles et amblyopes du Bénin, Didier Adandjèhla Laly, évoque l’absence quasi-totale de documents en braille, la construction d’une cantine moderne, la construction d’un internat pour diminuer les cas d’abandons, la réfection et l’équipement de l’infirmerie, le recrutement du personnel adéquat…

« Le CPSA de Sègbèya pourrait mieux faire s’il disposait de moyens suffisants lui permettant de faire face aux difficultés auxquelles il est confronté », renchérit sa directrice, Ridiatou Amoussa Paraïso.

Leurs doléances sont visiblement bien notées par l’autorité. « Je voudrais ici prendre l’engagement de renforcer davantage l’appui à nos centres spécialisés dont je mesure l’ampleur des besoins et dont j’appréhende les difficultés. Je partage votre souffrance face à l’insuffisance de moyens et vous assure que je veillerai à ce que des solutions idoines soient trouvées à vos difficultés », promet le ministre en charge des Affaires sociales.

« Doter notre centre de vivres et de matériels, c’est renforcer la capacité de prise en charge scolaire. Nous équiper en matériel informatique, c’est garantir notre insertion socioprofessionnelle », indique le porte-parole des bénéficiaires, Prisca Tossou, en guise de remerciement pour ces engagements en leur faveur.

 

La Nation, 8 février 2018

 

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Chanson de l'étoile bleue
par Rabah BELAMRI (poète aveugle algérien)

 

Perdrix, qu'as-tu fait de l'étoile bleue ?

Je l'ai donnée au vent qui pleurait la cime.

Vent, qu'as-tu fait de l'étoile bleue ?

Je l'ai donnée au laurier qui pleurait son ombre.

Laurier, qu'as-tu fait de l'étoile bleue ?

Je l'ai donnée à la rivière qui pleurait l'écume.

Rivière, qu'as-tu fait de l'étoile bleue ?

Je l'ai donnée à la jeune fille qui pleurait sa rose.

Jeune fille, qu'as-tu fait de l'étoile bleue ?

Je l'ai celée en mon cœur pour aimer le jour.

Une étoile appelle la tendresse

Une chanson de pluie et de vent lui ouvre la caresse.

 

(Extrait de : "Le galet et l'hirondelle")

 

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Sénégal : Emploi : petite lueur chez les déficients visuels, ils en veulent plus !

 

Beaucoup de déficients visuels se sont battus pour étudier et acquérir des diplômes, mais ils peinent à trouver un emploi. Ceux qui ont pu obtenir une occupation se plaignent d’un manque d’adaptation tandis que d’autres sont parvenus à s’épanouir dans leur travail.

 

Une voix féminine robotisée émerge à chaque fois que Djibril Pam tape sur le clavier de son ordinateur, doté d’un logiciel pour malvoyant.

Âgé d’une trentaine d’années, Djibril Pam est un handicapé visuel et agent à la direction de l’action sociale, un organe du ministère sénégalais de la Santé.

Une prouesse dans un pays où pendant longtemps, les malvoyants ont été assimilés à des cas sociaux. D’ailleurs beaucoup de déficients visuels se retrouvent encore dans les rues des grandes villes à faire la manche.

Drapé dans un boubou traditionnel, M. Pam nous explique les débuts difficiles de son entrée dans le monde du travail.

« Ce n’est pas un système assez huilé pour un déficient visuel. Certains de mes camarades aveugles qui travaillent dans la fonction publique n’ont pas tous les outils requis », explique-t-il.

Pour bien mener son travail au quotidien, un ordinateur a été mis à sa disposition par son service. Mais c’est grâce à ses propres moyens qu’il s’est procuré un lecteur d’écran (Jaws) et un scanner en braille. Sans ces outils additionnels, il lui serait impossible de travailler.

Mais tout le monde n’a pas la chance de Djibril. Nombre d’handicapés qui ne disposent pas d’un tel équipement travaillent dans des conditions difficiles.

Pape Gaye est kinésithérapeute depuis 2000. Il travaille au Centre Talibou Dabo, une structure publique spécialisée dans la réadaptation des enfants handicapés, sise dans le quartier populaire de Grand Yoff à Dakar.

« La kinésithérapie ne requiert pas beaucoup d’adaptations, mais malgré cela les moyens ne sont pas réunis. Il n’y a aucun matériel, aucune disposition pour un aveugle, c’est à moi de m’adapter », déplore-t-il calmement.

Ne disposant d’aucun outil pour lire ses documents, M. Gaye est obligé de faire appel aux collègues pour la lecture de ses fiches.

 

Le privé traîne le pas

Malgré leur handicap et les préjugés sociaux, les déficients visuels refusent de baisser les bras. Certains d’entre eux ont décidé de se battre pour gagner une place dans la société.

Grâce à l’éducation spécialisée qu’offre l’Institut National d’Éducation et de Formation des Jeunes Aveugles (INEFJA, basé à Thiès), beaucoup d’entre eux ont eu la chance de faire des études jusqu’au bac, puis à l’université.

Selon Djibril Pam, qui est aussi le président de l’association des anciens pensionnaires de l’INEFJA, 15 membres de son organisation travaillent aujourd’hui dans la fonction publique. « L’association compte 132 membres dont 75 titulaires du baccalauréat », précise M. Pam.

Au niveau du privé, l’intégration des déficients visuels et des handicapés en général est à un niveau encore primaire. « Les entreprises n’ont pas une politique d’inclusion, il y a une incompréhension du plan de travail de la personne déficiente visuelle », déplore Ali Dia, instructeur spécialisé.

 

Égalité des chances

Au Sénégal, la politique de l’État en matière d’insertion socio-professionnelle des handicapés se fait par le biais de la « carte d’égalité des chances ».

Cette carte permet à son titulaire de « bénéficier des droits et avantages en matière d’accès aux soins de santé, de réadaptation, d’aide technique, financière, d’éducation, de formation, d’emploi, de transport, ainsi qu’à tout autre avantage susceptible de contribuer à la promotion et à la protection des droits des personnes handicapées », indique-t-on dans la loi d’orientation sociale qui remonte à juillet 2010.

Il est aussi indiqué que « l’État, les organismes publics et privés réservent, autant que possible, aux personnes handicapées, les emplois qui leur sont accessibles dans la proportion de 15 % au moins. »

Toutefois, regrette Djibril Pam, cette disposition n’est pas encore entérinée par un décret présidentiel et donc, les déficients visuels diplômés attendent leur insertion.

« L’État doit mettre en œuvre les dispositions de la loi d’orientation sociale, notamment l’article 29 deuxième alinéa qui met en exergue les 15%. Il faudra que l’État puisse d’abord donner l’exemple et prendre des mesures incitatives pour le secteur privé », plaide M. Pam.

La loi d’orientation ne parle pas seulement de la carte d’égalité mais fixe aussi des facilités pour la création d’emplois en faveur de tous les handicapés dotés de prérequis comme la formation professionnelle.

Awa Gueye fait partie de ceux qui attendent encore que les promesses de l’État se réalisent pleinement.

« J’ai suivi une formation professionnelle en tissage en deux ans, mais je peine à trouver un travail. À chaque fois qu’il y a des financements pour des projets, je dépose un dossier, mais en vain », nous confie-t-elle.

« Tout ce que nous pouvons faire, c’est alerter l’autorité », ajoute M. Pam.

À la Direction de l’emploi et de l’insertion sociale, aucun interlocuteur n’a voulu répondre à nos questions malgré plusieurs tentatives.

 

Selon les résultats du dernier recensement général de la population publiés en 2013, le taux de prévalence du handicap au Sénégal serait de 59 pour 1.000 habitants. 

Sur une population de 14,12 millions, le pays compterait ainsi 826.000 handicapés, dont 12.390 handicapés visuels.

 

Adapté d’un article mis en ligne par ouestafnews, le 25/05/2018

 

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Rencontre avec Me Janvier Alfred Ngalle Mbock,
premier avocat non-voyant au Cameroun

 

Le lundi 2 avril 2018, Janvier Alfred Ngalle Mbock, 37 ans et aveugle depuis l'âge de 3 ans, a été le premier non-voyant à décrocher avec succès le Certificat d'aptitude à la profession d'avocat au Cameroun, parmi les 474 stagiaires admis à se présenter. Il se dit fier d'avoir ouvert la voie à d'autres handicapés visuels comme lui et d'avoir réalisé son rêve. Sa persévérance pour surmonter les nombreux obstacles suscite de nombreux commentaires enthousiastes sur les réseaux sociaux.

Voici son témoignage :

 

« Je suis né le 23 mars 1982 à Badjouck dans le département du Nyong-et-Kellé (Centre du Cameroun). J'ai perdu la vue à l'âge de 3 ans dans un accident de la circulation. J'ai commencé l'école à 8 ans au Bulu Blind Center de Buea (Sud-Ouest du Cameroun) où j'ai passé 7 ans. Là-bas j'étudiais en anglais. J'ai obtenu le diplôme de fin d'études primaires en 1997. Je suis ensuite allé effectuer une partie de mes études secondaires à Eseka (Centre du Cameroun).

J'ai ensuite rallié Douala (ville côtière et métropole économique) où je me suis inscrit au lycée de Ndog Hem, pour la première et la terminale. Après l'obtention du baccalauréat, j'ai intégré l'université de Douala.

N'ayant pas effectué mes études secondaires et universitaires dans des établissements spécialisés, j'ai dû recourir à tous les arguments pour convaincre les chefs d'établissements que j'étais capable de suivre les cours. Cela n'a pas été facile. Quand je me suis inscrit en 6ème, je suis allé voir le responsable de l'établissement que j'avais sollicité. Il était stupéfait. Il m'a même demandé qui allait me conduire à l'école. Pendant les cours, je prenais des notes en braille en même temps que mes camarades. Je lisais ensuite mes cours à la maison pour préparer les interrogations. Pendant les devoirs surveillés, j'utilisais une machine à écrire mécanique, comme celles dont disposaient autrefois les secrétaires. Je plaçais ma feuille blanche, prenais un ruban neuf et je tapais mon devoir que je rendais pour correction comme tout le monde. Au secondaire j'éprouvais des difficultés lors des cours de mathématiques. Pour la géométrie, je ne pouvais pas dessiner en braille. Heureusement, j'étais dispensé de cet exercice. Mon évaluation se faisait sous la forme de questions. J'avais aussi des difficultés quand les professeurs écrivaient au tableau les noms des auteurs de certains textes ou lors des cours de langue comme l'allemand où tout était écrit au tableau. Je devais me rapprocher d'un camarade pour tout avoir. Si le professeur était compréhensif il nous faisait prendre des notes. Idem à l'université. Je n'ai appris l'informatique qu'après avoir obtenu ma maîtrise en droit en 2007.

Je me suis ensuite lancé dans des affaires qui n'ont pas marché. Je ne pouvais plus rester à la maison, d'autant que je n'ai jamais voulu constituer une charge pour quiconque et que je tenais à servir et à aider les autres. C'est ainsi qu'en 2012 je me rapproche d'un avocat qui est mon voisin, Me Longa qui m'accepte de bon gré. C'est en travaillant avec lui que j'ai vraiment pris goût à ce métier. J'aurais pu opter pour une autre activité mais mes débuts dans ce métier m'avaient tellement plu que je n'ai plus souhaité changer. Et puis j'avais fait des études de droit et il n'était pas question que je fasse autre chose. J'ai estimé qu'étant avocat, je pouvais défendre les personnes vulnérables.

Dix mois plus tard j'intègre le cabinet de Me Alice Nkom, celle qui m'a parrainé. J'ai fait 2 ans là-bas. En 2014 l'examen d'admission en stage est lancé. Je suis reçu et comme je n'avais pas de cabinet où passer ma période de stage, le bâtonnier est intervenu pour me faire intégrer le cabinet de Me Joseph Claude Billigha où je suis encore aujourd'hui. J'ai effectué mes trois années de stage avec beaucoup de peines et difficultés. Ainsi lorsque l'on me confie un dossier, je ne peux pas le lire faute de matériel adapté. Il existe mais coûte très cher. Au cours d'un débat lors d'une audience, si la partie adverse produit une pièce, il faut que je sois assisté par un autre confrère qui va examiner ladite pièce afin que je soulève si nécessaire des objections. J'ai évoqué des difficultés, mais je dois dire qu'il y a aussi beaucoup de domaines dans lesquels je peux travailler sans trop de peine.

Il y a aussi des réussites : pendant ma période de stage j'ai gagné toutes les affaires que j'avais. J'ai eu la chance d'avoir des dossiers où le juge a toujours donné raison aux clients que j'ai défendus. Je ne pense pas que ma seule présence explique tout.

Mais la marche jusqu'aux portes du barreau est semée d'embûches. Mon handicap ne plaide pas non plus en ma faveur. On m'a souvent découragé en me disant que je n'allais pas m'en sortir étant non-voyant. Ça n'a pas été facile, même quand je suis arrivé au cabinet de celle qui m’a parrainé et formé. Il m'a fallu la convaincre que si je pouvais voyager de Douala à Yaoundé sans assistance, c'est qu'il m'était également possible d'aller aux audiences. Ma volonté et mon enthousiasme l'ont motivée à continuer. Et on y est arrivé !»

Adapté d’une interview réalisée par Paul KANATE, Africa top sport, 5 mai 2018

 

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Courrier du Sud

Extraits du rapport de l’accompagnatrice des activités sportives du CJAD (Dschang, Cameroun)

 

NDLR : La CSI finance à titre transitoire sa rémunération pour la troisième année consécutive.

 

1. Les activités sportives et de loisirs

Les activités sportives comptant pour l’année académique 2017-2018 ont débuté au centre le 6 octobre 2017. À l’unanimité il avait été convenu entre l’accompagnatrice et les pensionnaires que les séances se dérouleraient le samedi de 06h00 à 8h00 pour un début, pour s’étendre ensuite au dimanche de 6h00 à 8h00 et au mercredi après-midi.

Plusieurs disciplines étaient au programme à savoir :

- l’athlétisme : les courses de vitesse (100m, 200m et 400m) ;

- le cécifoot ;

- le goalball.

Nous avons pris part à deux compétitions (régionale et départementale) pendant cette période.

- Le 29 novembre 2017, les athlètes du CJAD ont participé à un tournoi organisé à Bafoussam (chef lieu de la région de l’Ouest) qui regroupait les athlètes déficients visuels des autres départements. Les différentes rencontres se sont déroulées sous le regard des autorités de la ville et c’est le Délégué Régional des Sports et de l’Éducation Physique qui a donné le coup d’envoi du match de goalball. Au terme du tournoi, les jeunes du CJAD ont terminé 2e au goalball et 1er au cécifoot.

- Le 8 décembre 2017 : une rencontre de cécifoot a opposé les élèves du collège Notre-Dame à ceux du Lycée Classique, tous pensionnaires du CJAD. Ce match a eu lieu dans le cadre de la fête du collège Notre-Dame et s’est déroulé sous le regard du principal, des enseignants et des élèves. À l’issue de la rencontre, le Lycée Classique a remporté la victoire aux tirs aux buts.

 

2. La traduction des copies aux examens séquentiels

En marge des activités menées dans le cadre du sport, nous traduisons les copies des élèves du Collège Notre-Dame et du Lycée pendant les examens séquentiels sous la direction de Lawrence, accompagnant scolaire titulaire.

 

3. Les difficultés et perspectives

Malgré la bonne marche de nos activités, nous déplorons la participation timide des jeunes filles et la non participation des plus jeunes à la pratique sportive. Ceci pouvant être causé par la distance éloignée du stade par rapport au centre.

Nous émettons le vœu que la cour du centre soit aménagée pour permettre aux touts petits de se frotter à la chose sportive.

En perspectives, nous continuerons à sensibiliser les jeunes filles sur les bienfaits de la pratique sportive.

 

La coordinatrice des activités sportives,
Mme FEZE
Harlette Bergeline

 

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Courriel reçu le 22 août 2017 du coordonnateur du projet Voatra Asa de la Fédération des Associations des Aveugles de Madagascar, Antenne régionale d’Antsirabe

 

Bonjour Monsieur Yves et toute l’équipe de la CSI de Voir Ensemble,

Nous sommes très ravis de partager avec vous les informations suivantes, relatives à nos activités :

1. Concernant la mise en œuvre du Projet actuel, toutes les activités se déroulent comme prévu : identification des personnes non et malvoyantes dans les régions d’intervention, leur appui et accompagnement dans la scolarisation, leur insertion dans des emplois salariés, leur appui et accompagnement dans la réalisation des activités personnelles génératrices de revenus et le renforcement de leur capacité professionnelle.

2. Nous avons reçu jusqu’à maintenant 65 colis qui comprennent des livres braille, cassettes audio, cannes blanches, tablettes et poinçons, dictaphone, et tous autres matériels de la part de la CSI Voir Ensemble Paris et groupe du Rhône. On enregistre depuis pas mal de temps le passage des jeunes et adultes non et malvoyants qui ont besoin de se documenter dans notre centre de ressources. Toutes ces personnes ont pu profiter de l’existence de ce centre pour échanger entre elles et renforcer leur savoir-faire. Nous sommes infiniment reconnaissants à tous les donateurs, et particulièrement à Voir Ensemble pour la contribution. Ici, nous réitérons notre demande pour ces matériels spécifiques puisque la rentrée scolaire va venir et les besoins en la matière ne sont pas encore comblés : cannes blanches, papier braille et les divers matériels didactiques spécifiques,… Une demande de notre part vous parviendra prochainement.

3. Depuis le mois de mai de cette année où le centre de formation en informatique adaptée a été mis en place au sein du siège du Projet VOATRA ASA, 30 jeunes non et malvoyants sont formés en informatique adaptée. C’est le fruit de la collaboration entre le Projet VOATRA ASA et le CBM.

4. Madame RAJAONARISOA est actuellement à Antsirabe. Nous nous rencontrons souvent. Des discussions sur l’amélioration de la mise en œuvre des activités et des descentes de suivi, d’appui et d’accompagnement auprès de nos bénéficiaires dans nos zones d’intervention ont été organisées ensemble. Nous sommes sûrs qu’elle vous transmettra prochainement les nouvelles et  les échos de notre collaboration.

5. Cette année, 8 jeunes se sont présentés à l’examen du baccalauréat. 4 parmi eux, venant de la ville d’Ambositra, ont réussi, tandis que ceux issus des autres Régions attendent leurs résultats. Les Techniciens du Projet participent pleinement à la transcription en écriture braille des sujets. Nous tenons à informer que jusqu’à maintenant, le ministère de l’enseignement supérieur malgache qui se charge de cet examen n’assure pas la transcription des sujets. Il laisse le soin aux candidats de chercher des techniciens pour assurer ce travail.

6. Suite aux différentes rencontres de plaidoyer avec le chef de Région de Vakinankaratra, la Région qui abrite la ville d’Antsirabe, il a accepté d’accueillir une personne déficiente visuelle pour occuper le poste de secrétaire au sein de la Région. Après concertation, le Projet VOATRA ASA a choisi Noëline, une non-voyante bachelière, ayant suivi le cours d’informatique adaptée et une longue période de stage au sein du Projet VOATRA ASA.

7. Le partenariat entre l’Association Aveugles Sans Frontière et le Projet VOATRA ASA est en cours. Il s’agit de la prise en charge de la scolarisation de 4 élèves non-voyants, le financement du poste de technicien en insertion socioéducative et accompagnement pédagogique, ainsi que l’appui en papier braille.

8. Après une concertation du Projet VOATRA ASA avec les entreprises de transport de la ville d’Antsirabe, la gratuité des bus pour les travailleurs non et malvoyants est renouvelée pour cette année. Voatra Asa se charge d'établir les cartes de transport.

9. La Fédération des Associations des Aveugles de Madagascar, à travers le Projet VOATRA ASA, prévoit de publier un bulletin de liaison trimestriel en écriture braille en langue malgache. Le premier numéro attend juste la mise au point de l’embosseuse.

10. Nous réitérons notre demande d’abonnement au bulletin Solidarité Magazine.

Amicalement.

Haingo RATOBIMIARANA

 

NDLR : Sur la base des nouvelles que nous recevons régulièrement de ce partenaire, nous avons pu soutenir le Projet Voatra Asa par la fourniture de matériel didactique, de livres et revues, de papier braille et de quelques cannes blanches. Notre amie Reine Rajaonarisoa, qui se rend sur place environ deux fois par an, a aussi pu leur remettre de notre part des jeux de société et un ballon de torball.

 

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Rubrique humour

 

Quelques perles du Bac, distillées par des élèves sans doute soucieux d’apporter aux correcteurs un peu de divertissement !

 

Le Mont Blanc est à 4 807 mètres au-dessus du niveau de la mer, sauf quand la mer monte.

Pour congeler un corps, il faut le faire bouillir en remplaçant la chaleur par du froid.

La Terre serait recouverte de glace s’il n’y avait pas les volcans pour la chauffer de l’intérieur.

Il est triste de penser que le pôle Nord et le pôle Sud ne se rencontreront jamais.

Il ne faut pas violer ni tuer parce que ça nous crée des problèmes avec les lois.

Un ion à charge négative est un onion.

La physique a été découverte par hasard dans l’antiquité par Larry Stote.

Beaucoup d’hommes politiques ont fait l’ENA, l’École nationale de l’admiration.

Archimède a été le premier à prouver qu'une baignoire peut flotter.

Ce n’est pas parce que c’est un grand philosophe qui a dit que la Terre est carrée qu’elle est carrée.

En France, il est interdit d’arrêter quelqu’un en son absence.

Picasso a représenté les Demoiselles d’Avignon sous forme de cubes. C’est sa période cubaine.

La force de Coriolis provoque des cyclones dans les lavabos.

Quand il voit, l'œil ne sait pas ce qu'il voit. Il envoie une photo au cerveau qui lui explique.

La croisade c'est un voyage en bateau organisé par le pape.

 

 

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Recette : Dal indien aux brocolis et aux épices

 

Temps : 1 heure.

Très facile !

Bon marché.

 

Ingrédients pour 4 personnes.

-       200g de lentilles blondes (ou vertes)

-       1 brocoli

-       1 boîte de tomates pelées

-       1 oignon jaune

-       2 gousses d’ail

-       2 cuillères à café de cumin en poudre

-       2 cuillères à café de curcuma (ou de curry en poudre)

-       2 cuillères à café de piment doux

 

Préparation.

  1. Peler ail et oignon. Les couper en tous petits dés.
  2. Laver les lentilles dans une passoire sous l’eau courante.
  3. Mettre les lentilles dans une casserole et les couvrir de 5 fois leur volume d’eau. Ajouter les épices, l’ail et l’oignon. Saler et porter à ébullition, puis laisser cuire à feu doux 15 minutes environ.
  4. Couper les tomates en dés et le brocoli en morceaux. Les ajouter dans la casserole avec le jus des tomates.
  5. Laisser encore cuire 30 minutes jusqu’à ce que le mélange ait la consistance d’une soupe épaisse.
  6. Rectifier l’assaisonnement et ajouter si besoin un peu de cumin. 

 

Remarque :

Ce plat est complet, mais on peut aussi le servir avec du riz basmati, en cas de grosse faim.

 

 

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